Gédéon TALLEMANT DES RÉAUX / Historiettes (1) / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1960
Vieille blague :
« Pour divertir le Cardinal [de Richelieu] et contenter en mesme temps l'envie qu'il [Boisrobert] avoit contre le Cid, il le fit jouer devant luy en ridicule par les laquais et les marmitons. Entre autres choses, en cet endroit où D. Diegue dit à son fils : Rodrigue, as-tu du coeur ? Rodrigue respondoit : Je n'ay que du carreau. » <Boisrobert, p.400>
Friedrich Melchior baron de GRIMM / Correspondance littéraire, philosophique et critique (tome 1) / Garnier frères 1877 [BnF]
« Racine pressait Chapelle de lui dire son sentiment sur la tragédie Bérénice, qui n'est guère qu'une élégie amoureuse : "Ce que j'en pense ? répondit Chapelle : Marion pleure, Marion crie, Marion veut qu'on la marie." Mot plaisant qui a réussi. » <p.155>
Jean-François MARMONTEL / Mémoires (1804) / Mercure de France 1999
« On sait qu'avec beaucoup de noblesse et de fierté dans l'âme, le maréchal de Saxe avait les moeurs grivoises. Par goût autant que par système, il voulait de la joie dans ses armées, disant que les Français n'allaient jamais si bien que lorsqu'on les menait gaiement, et que ce qu'ils craignaient le plus à la guerre, c'était l'ennui. Il avait toujours dans ses camps un opéra-comique. C'était à ce spectacle qu'il donnait l'ordre des batailles ; et ces jours-là, entre les deux pièces, la principale actrice annonçait ainsi : "Messieurs, demain, relâche au théâtre à cause de la bataille que donnera M. le maréchal ; après-demain, Le Coq du village, Les Amours grivois, etc". » <p.131>
Albert CIM / Récréations littéraires / Hachette 1920 [BnF]
« "J'applaudis des deux mains," lit-on dans une lettre de Victor Hugo, mentionnée dans Le Voleur du 28 février 1879 (p.141). "Je voudrais bien savoir, demande le rédacteur en chef de ce journal, comment M. Victor Hugo s'y prendrait pour applaudir d'une seule main." » <p.126>
Victor HUGO / Choses vues / Histoire / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1987
« N'applaudissez pas sur la joue de votre voisin. » <p.937>
Henry MARET / Pensées et opinions / Paris, Flammarion 1903 [BnF]
« Les vieux Gaulois sont toujours amoureux de spectacles, et ils aimeraient mieux se passer de chemise que de comédie. » <p.245>
« Seuls sont bienfaiteurs de l'humanité ceux qui, ainsi que Shakespeare, nous font parcourir des jardins enchantés, rêver des rêves héroïques qui nous donnent l'oubli de notre stupide existence ; ou ceux qui, ainsi que Labiche, nous tirent de notre immense ennui en nous versant les flots d'une inépuisable gaieté. Tout le reste est vanité, perte de temps, inutiles soucis. » <p.240>
« La comédie corrige les manières, et le théâtre corrompt les moeurs. » <Pensées, p.1407>
Alfred de VIGNY / Journal d'un poète / Paris, A. Lemerre 1885 [BnF]
« Les acteurs sont bien heureux, ils ont une gloire sans responsabilité. » <1834, p.92>
Edmond et Jules de GONCOURT / Journal (t.3) / Robert Laffont - Bouquins 1989
« Pour être connu en littérature, être universellement connu, on ne sait pas combien il importe d'être homme de théâtre. Car le théâtre, pensez-y bien, c'est toute la littérature de bien des gens, et de gens supérieurs, mais si occupés qu'ils n'ouvrent jamais un volume n'ayant pas trait à leur profession, l'unique littérature en un mot des savants, des avocats, des médecins. » <30 janvier 1892, p.659>
Tristan BERNARD / L'Esprit de Tristan Bernard / nrf Gallimard 1925
« Conseils aux jeunes auteurs : Choisir de préférence comme pseudonyme, le nom d'une rue très passante. S'appeler par exemple Henri Poissonnière ou Gaston de Bonne Nouvelle. Aussitôt que l'auteur aura acquis une certaine notoriété, la foule s'imaginera vaguement qu'il a reçu du conseil municipal cet éclatant hommage : l'attribution de son nom à une des voies parisiennes les plus en vue... Choisir pour votre pièce un titre déjà pris par un confrère et faire passer une note aux journaux. Vous vous attirez dans les deux jours qui suivent une lettre de protestation. On réclame la priorité du titre. Vous vous inclinez. Vous envoyez à l'auteur une lettre pleine de déférence admirative, et vous donnez publiquement à votre pièce un des titres retenus par un autre confrère. Il faut s'arrêter au bout de trois fois. Les auteurs, c'est entendu, ne manqueront jamais de bonne volonté pour protester. Tous de même, à la longue, votre désir d'une bonne petite publicité gratuite risquerait d'être percé à jour... » <La faune des plateaux p.158>
Francisque SARCEY / Quarante ans de théâtre (1) / Bibliothèque des Annales politiques et littéraires 1900
« On n'a pas mauvais goût par cela seul qu'on ne se plaît point à la représentation des tragédies classiques. Elles sont admirables sans doute, mais elles ont le tort de n'avoir pas été faites sur notre mesure, de ne plus répondre à nos besoins ni à nos préoccupations. Elles ressemblent à la jument de Roland, qui avait tant de qualités et qui était morte. Le théâtre, comme tous les autres arts, ne vit qu'à la condition de changer sans cesse, se modelant à chaque génération sur le goût qui domine chez elle. » <Le théâtre et la morale, 2 juillet 1866, p.181>
« C'est une règle qui ne souffre pas d'exception ; on ne goûte pleinement au théâtre que ce qui est goûté de tout le monde. L'essence du théâtre, c'est le public ; Le théâtre n'est pas et ne peut pas être un plaisir solitaire. » <Le public des premières, 14 avril 1884, p.210>
Salvador DALÍ / Pensées et anecdotes / Le cherche midi éditeur 1995
« Si les classiques sont froids, c'est parce que leur flamme est éternelle. » <p.89>
Jean COCTEAU / Journal (1942-1945) / Gallimard 1989
« Un véritable dramaturge connaît mal ses personnages. Ils le dépassent et profitent, pour vivre, d'une sorte d'hypnose où vous met la création. Il serait ridicule de croire qu'un dramaturge est dieu et même ridicule de croire qu'un dieu en sache si long sur ses créatures. Chaque jour je découvre les dessous de la pièce et les mobiles de mes personnages. » <mars 1942, p.20>
Sacha GUITRY / Théâtre, je t'adore / Omnibus 1996
« Mettre à la scène un personnage indigne et raconter sa vie, ce n'est point plaider sa cause ni prendre son parti. Un auteur dramatique n'est pas fatalement un moraliste. Et d'ailleurs ses pièces peuvent être morales sans que cela soit visible, trop visible. Pour faire triompher à tout prix la morale, que de mensonges ont été commis au théâtre ! Pourquoi ne reconnaît-on pas aux auteurs dramatiques les mêmes droits qu'aux romanciers ? Pourquoi faut-il que nous faussions constamment la vérité ? Devons-nous prendre sans cesse des gants et ménager les susceptibilités du public parce qu'il lui plaît de feindre une candeur hypocrite ? J'ai fait jouer naguère une pièce dont le personnage principal était un vilain monsieur, un très vilain monsieur. C'était mon droit. On me l'a pourtant contesté, et Arthur Meyer, qui était un homme bien intelligent cependant, m'a dit : "C'est dommage que, venant d'être décoré de la Légion d'honneur, vous donniez justement cette pièce-là !" » <p.13>
« Qu'entendez-vous par pièce bien construite ? Est-ce parce que vous en voyez la charpente, que vous la croyez bien bâtie ? Que vous vantiez la construction d'un aqueduc ou de la tour Eiffel, soit, mais que penseriez-vous d'un monsieur qui s'extasierait sur la "construction" de la cathédrale d'Amiens ou du Petit Trianon ? » <p.14>
« Un bon acteur est un monsieur qui fait croire au public qu'il mange un poulet qu'on vient de lui servir et qui est en carton. Tandis qu'un grand acteur mangera du poulet, du poulet véritable, en faisant croire au public qu'il fait semblant de manger d'un poulet en carton. Augmentant la difficulté, pour son plaisir, en somme, il aura fait semblant de faire semblant. » <p.22>
Catharsis :
« Jean Yonnel jouait "Notre Dame de Paris". Il tournait le dos à la fenêtre où apparaissait Claude Frollo, le poignard à la main. Du poulailler, une femme cria : "- Attention, petit, le ratichon va te suriner !..." Yonnel reçut le coup de couteau et tomba. Alors la femme furieuse : "- Je t'avais pourtant prévenu, eh con !" » <p.62>
« Au cours d'une tournée en province, Georges Berr, Sociétaire de la Comédie Française, reçoit de l'Administration du Théâtre Français, un télégramme lui proposant deux dates différentes pour jouer, s'il est libre, "Le Mariage de Figaro" et "Le Baiser". Par retour, il répond : "PEUX BAISER, MARIAGE IMPOSSIBLE". » <p.65>
Alain FINKIELKRAUT / Petit fictionnaire illustré / Éditions du Seuil 1981
« Tracteur : comédien saisi par l'angoisse au moment d'entrer en scène. » <p.76>
Jean-Michel RIBES / Sursauts, brindilles et pétard / Grasset 2004
« Molière riait beaucoup aux pièces de Louis XIV. » <p.42>