PLUTARQUE / Les Vies des hommes illustres I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1951
« Et Solon, qui était déjà fort vieux, et n'avait personne qui le secondât, s'en alla néanmoins encore sur la place, où il parla aux citoyens qu'il y trouva, leur reprochant leur bêtise et leur lâcheté de coeur, et les encourageant de ne laisser pas perdre leur liberté. Ce fut lors qu'il dit un propos qui depuis a bien été recueilli et bien renommé : "Auparavant, dit-il, il vous était plus facile d'empêcher que cette tyrannie ne se formât ; mais maintenant qu'elle est toute formée, ce vous sera plus de gloire de l'abolir et exterminer." » <Vie de Solon, LXIII p.209>
Baltasar GRACIÁN / Maximes / Paris, Rollin fils 1730
« Il ne convient point de se former une si grande idée des hommes, que leur présence doive faire trembler, quels qu'ils soient. Que le courage ne plie jamais sous l'imagination. » <Maxime CLXXXII Il est d'une prudence nécessaire au mérite d'avoir un peu de hardiesse, p.216>
Jean de LA FONTAINE / Fables / La Pochothèque LdP 2000
« La vraie épreuve du courage N'est que dans le danger que l'on touche du doigt. » <Livre sixième II Le lion et le chasseur p.320>
Joseph JOUBERT / Carnets / nrf Gallimard 1938-1994
« Le courageux a du courage et le brave aime à le montrer. » <16 janvier 1791 t.1 p.129>
Victor HUGO / Choses vues / Histoire / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1987
« Nul ne brave mieux le danger que celui qui le dédaigne ; nul ne le dédaigne mieux que celui qui l'ignore. Dans les temps de crise, ceux-là surtout font la force d'une nation qui ne croient pas à ses périls. » <p.992>
« Les hommes qui ne se battent pas en duel croient que les hommes qui se battent au duel à mort sont courageux. » <II p.351>
Léon BLOY / Le mendiant ingrat / Journal I / Robert Laffont - Bouquins 1999
« Le Duel, selon moi, est une saleté ridicule, inventée par des saltimbanques. Je le remplace volontiers par des coups de pied dans le derrière des autres... » <13 avril 1894, p.82>
Jules RENARD / Journal / Robert Laffont - Bouquins 1990
« Il faut avoir le courage de préférer l'homme intelligent à l'homme très gentil. » <13 décembre 1899 p.436>
« N'écoutant que son courage, qui ne lui disait rien, il se garda d'intervenir. » <18 octobre 1908 p.950>
Théophile GAUTIER / Le Capitaine Fracasse (1863) / OEuvres / Robert Laffont - Bouquins 1995
« Il n'y avait plus moyen de reculer, car peu de gens ont le courage d'être lâches devant témoins. » <Ch. IX Coups d'épée, coups de bâton et autres aventures, p.1228>
Léon BLOY / Exégèse des lieux communs / Mercure de France 1968
« On ne se refait pas. C'est un mot de phénix découragé. Les joueurs le disent aussi quelquefois, mais sans conviction. » <p.40>
André GIDE / Journal 1889-1939 / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1951
« Il n'est pas de vertus humaines que je prise autant ou aussi peu, suivant les cas, que le courage. "Le vrai courage, disait Napoléon, c'est celui de trois heures du matin." Il voulait dire par là, sans doute, que le courage auquel il accordait estime était celui d'où toute griserie, toute vanité, toute émulation fussent exclues. Un courage sans témoins, sans complices ; un courage à froid et à jeun. » <p.1279>
Paul LÉAUTAUD / Journal littéraire / Mercure de France 1986
« Ce matin, dans les journaux, cette nouvelle : "Hier en Méditerranée, un bâtiment pétrolier a sombré dans la tempête. Son capitaine, sur le pont, s'est englouti avec lui." Celui-là, pour le coup, un simple imbécile. La mort de Péguy, par exemple, telle qu'on l'a racontée, restant debout devant les balles, alors que tous ses hommes lui criaient : "Couchez-vous, lieutenant, couchez-vous !" et restant debout, droit comme un i. Que veut-on que me fasse la mort de cet homme ? Il eût mieux servi son pays en se conservant vivant. Son acte est imbécile. "L'héroïsme", est souvent cela. » <22 décembre 1939 II p.2148>
Léon DAUDET / Souvenirs / Robert Laffont - Bouquins 1992
« C'est un stoïque des grandes circonstances, que désemparent facilement les petits tracas de la vie courante. » <p.100>
ALAIN / Souvenirs de guerre / Les Passions et la Sagesse / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1960
« Un peu plus tard, et quand j'étais remonté aux batteries, le capitaine fut blessé à la tête, et revint après un petit mois d'hôpital. "Je fus blessé, me dit-il, par ma bêtise. Je sors au matin de mon abri, portant ma cuvette. Il y avait un tir sur la batterie à côté ; quelques éclats volaient jusqu'à moi ; je remportai ma cuvette ; mais alors je me dis que je subissais la volonté de l'ennemi, ce qui est se reconnaître vaincu. Je sortis de nouveau, portant ma cuvette, et c'est alors que j'eus ce coup sur la tête. Vous qui écrivez sur le courage, retenez cela." » <p.520>
ALAIN / Les idées et les âges / Les Passions et la Sagesse / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1960
« La peur est ce qui gronde dans le courage ; la peur est ce qui pousse le courage au delà du but. Car l'homme ne pense qu'à cette victoire sur soi poltron, et ne la voit jamais gagnée, puisque l'homme peut avoir peur de ses propres actions, à seulement y penser, et même de son propre courage. C'est pourquoi il n'écoute point conseil. Je le vois plutôt qui tient conseil entre les parties de lui-même, méditant contre les conspirateurs et les traîtres, qui lui sont intimes et quelquefois impudemment. Qui n'a pas palpé sa propre peur, en vue de la démasquer, de la traîner nue, de l'injurier ? » <p.165>
ALAIN / Propos II / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1970
« Qu'il est difficile d'être courageux sans se faire méchant ! » <4 mai 1913, p.299>
Jerome K. JEROME / Arrière-pensées d'un paresseux (1898) / Arléa 1998
« Alors comme ça, ce voyou de Tom a reçu la Victoria Cross. Il s'est précipité sous une pluie de projectiles pour sauver le drapeau en lambeaux. Qui l'aurait cru ? On aurait pourtant juré que le troquet du village était le but suprême de toutes ses ambitions. Le hasard vient trouver Tom et nous le découvrons. Pour Harry, le sort s'est montré moins clément. Harry a toujours été un vaurien. Il buvait et on dit même qu'il battait sa femme. Qu'on l'enterre, bon débarras, il n'était bon à rien. En sommes-nous bien sûrs ? » <p.189>
Louis-Ferdinand CÉLINE / Voyage au bout de la nuit (1932) / Romans (1) / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1997
« On dirait qu'on peut toujours trouver pour n'importe quel homme une sorte de chose pour laquelle il est prêt à mourir et tout de suite et bien content encore. Seulement son occasion ne se présente pas toujours de mourir joliment, l'occasion qui lui plairait. Alors il s'en va mourir comme il peut, quelque part... Il reste là l'homme sur la terre avec l'air d'un couillon en plus et d'un lâche pour tout le monde, pas convaincu seulement, voilà tout. C'est seulement en apparence la lâcheté. » <p.329>
Antoine de SAINT-EXUPÉRY / Terre des hommes / OEuvres / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1959
« Seul l'inconnu épouvante les hommes. Mais, pour quiconque l'affronte, il n'est déjà plus l'inconnu. » <II ii p.166>
Henry de MONTHERLANT / Mors et vita / Essais / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1963
« Les lâches survivent. Donc, il faut bien reconnaître que leur lâcheté est justifiée. » <Courage et peur, p.538>
Emil CIORAN / Carnets 1957-1972 / nrf Gallimard 1997
« La lâcheté rend subtil. » <1 juin 1968 p.577>
Antoine BLONDIN / Ma vie entre des lignes / OEuvres / Robert Laffont - Bouquins 1991
« L'homme se distingue de l'animal en ceci qu'il est doué d'arrière-pensées. Ayez confiance en lui : on peut exiger à l'intérieur ce que l'on ne voit pas à la devanture. Quand Guillaumet en détresse dans la cordillère des Andes déclare : "Ce que j'ai fait, une bête ne l'aurait pas fait", nous le croyons d'autant plus que ses actes sont chargés de sens et de prix. La signification est un des privilèges de l'espèce. » <p.1015>
Jean-François DENIAU / Ce que je crois / Grasset (LdP) 1992
« Je suis frappé de voir à quel point le moindre risque physique ou naturel devient une excuse. ("Je ne suis pas venu, la météo annonçait du verglas...") À quel point nous laissons se développer une sorte de peur collective de tout ce qui pourrait être une menace ou même un changement. Le moindre excès de pluie ou de neige, de vent, de froid ou de chaleur, provoque une sorte de réaction apeurée qu'entretiennent les médias. Certes les catastrophes font de bons titres, mais certains jours la dramatisation est abusive pour 40 centimètres de montée des rivières ou 6 degrés de température en trop ou en moins ! Elle habitue le public à l'idée qu'il est normal de ne plus rien supporter. Je m'en inquiète parce que la lâcheté physique précède la lâcheté morale et y conduit. Mettre sur le même plan le brouillard qui bloque une autoroute un jour de départ en vacances scolaires et l'évocation de la déroute de juin 40 entraîne à l'esprit de déroute. » <p.52-53>
« Ce qui m'étonne le plus dans le courage humain est celui que l'on pourrait appeler du dernier message. Sans remonter aux siècles passés, au cours de ce XXe siècle seulement, combien d'hommes et de femmes, que rien ne préparait à l'héroïsme, sont morts héroïquement. C'est un mystère. Les cas de supplications, panique, gémissements sont extrêmement peu nombreux. Non, au contraire, face au peloton ou à l'exécution de masse, les vieillards relèvent la tête, les impotents se dressent, les jeunes mûrissent, les hésitants s'affirment, les sceptiques s'assurent, les agnostiques crient leur foi. Des mots admirables jaillissent alors que leurs auteurs ne peuvent même pas être portés par le sentiment que leur dernier cri sera connu et leur survivra. L'un des plus bouleversants est sans doute celui de ce jeune communiste fusillé par les nazis et tombant en criant : "Vive le peuple allemand !" Mais combien d'autres, partout, en tous temps, dans les guerres civiles en Amérique latine, dans les révolutions chinoises, dans les guerres européennes, ont eu à coeur, alors qu'ils savaient que c'était fini, la beauté du dernier mot, ou seulement du dernier instant. Le plus souvent en silence. » <p.67-68>