Friedrich Melchior baron de GRIMM / Correspondance littéraire, philosophique et critique (tome 1) / Garnier frères 1877 [BnF]
« Voltaire, pressant M. de Fontenelle de lui donner sa voix pour l'Académie : "Il faut attendre, lui répondit Fontenelle. - Mais que diriez-vous à l'abbé Le Blanc s'il vous faisait la même demande ? ajouta Voltaire. - Je lui dirais d'espérer", répartit Fontenelle. Il faut observer que Voltaire mit l'abbé Le Blanc comme l'homme de la littérature française qu'il méprisait le plus. » <p.77>
Lorédan LARCHEY / L'Esprit de tout le monde - Joueurs de mots (1891) / Berger-Levrault 1892
« PIRON De son temps comme du nôtre, la salle des séances publiques de l'Académie se trouvait souvent trop petite. On faisait queue à la porte, et Piron, confondu parmi les simples mortels, ne se montra pas un jour des plus patients : - Vraiment, cria-t-il, il est plus difficile d'entrer ici que d'y être reçu. Le mot serait plus piquant si Piron n'avait pas échoué dans sa candidature.
Elle est classique, cette autre pointe faite en passant dans la cour du Louvre, devant la salle des séances de l'Académie : - Tenez ! voyez-vous, ils sont là quarante ayant de l'esprit comme quatre. » <p.186>
Pierre VÉRON / L'Esprit de Pierre Véron / nrf Gallimard 1927
« Académie : - Quarante appelés et peu de lus. » <Le Carnaval du Dictionnaire. p.149>
« Mon épitaphe. Ci-gît... Qui ? Quoi ? Ma foi, personne, rien. Un qui, vivant, ne fut valet ni maître, Juge, artisan, marchand, praticien, Homme des champs, soldat, robin ni prêtre ; Marguillier, même académicien, Ni frimaçon. Il ne voulut rien être, Et véquit nul : en quoi certe il fit bien ; Car, après tout, bien fou qui se propose, Venu de rien et revenant à rien, D'être en passant ici-bas quelque chose ! Pour le soulagement des mémoires, et pour le mieux, j'ai cru devoir réduire cette Épitaphe à deux vers : Ci-gît Piron, qui ne fut rien, Pas même académicien. » <p.572>
Charles MONSELET / Les originaux du siècle dernier / Paris, Michel Lévy frères 1864 [BnF]
« Il [Louis-Sébastien Mercier] avait composé lui-même son épitaphe : Ci-gît Mercier, qui fut académicien, Et qui, cependant, ne fut rien. » <Mercier, p.71>
Léo CAMPION / Le petit Campion - Lexique encyclopédique illustré / J & R Sennac Paris 1947
« Épitaphe : Quelques vers sur beaucoup d'autres. » <n.p.>
« Habit : Ce qui reste de vert chez un académicien. » <n.p.>
Lorédan LARCHEY / L'Esprit de tout le monde - Riposteurs (1893) / Berger-Levrault 1893
« - Pourquoi ne pas vous présenter à l'Académie ? disait-on à Mably. - Si j'en étais, on pourrait s'étonner. J'aime mieux entendre dire : Pourquoi n'en est-il pas ! » <p.50>
« Tout en rendant justice au talent de Zola, Aurélien Scholl ne peut supporter le mot m.... si héroïquement imprimé dans ses romans, et il semble avoir prévu dès 1887, son entrée à l'Institut lorsqu'il écrit dans son Paris aux cent coups : - On ne peut nommer Zola à l'Académie, il faudrait percer le fauteuil. » <p.240>
Charles-Augustin SAINTE-BEUVE / Mes Poisons / Collection Romantique / José Corti 1988
« Victor Hugo est de l'Académie. Allons, allons, c'est bien : l'Académie a besoin de temps en temps d'être déflorée. » <p.52>
« Le choix d'Ancelot à l'Académie n'a été qu'ignoble ; celui de Balzac serait immonde. » <p.53>
Victor HUGO / Choses vues / Histoire / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1987
« L'autre jeudi, à l'Académie, M. Ancelot disait ce quatrain : J'ai joué, je ne sais plus où Sur un billard d'étrange sorte. Les billes restent à la porte Et la queue entre dans le trou. Cela faisait rire ceux que le dictionnaire ne faisait pas bâiller. » <31 novembre 1846 p.614>
« Il arriva un jour à l'Académie qu'un copiste malhabile, chargé de fournir des exemples donna celui-ci, tiré, disait-il, de Regnard (Le Joueur) : Je me mettrais en gage à mon besoin d'argent. Là-dessus, la commission du Dictionnaire bâcla une théorie pour démontrer comme quoi la locution était excellente, et neuve, et faisait partie des originalités de la langue française. L'Académie était en train d'approuver le rapporteur M. Patin, lorsqu'un membre (M. Ancelot) fit remarquer que Regnard n'avait pas écrit un mot de cela, et que le texte était, Le Joueur, acte II, scène ix : Je me mettrais en gage en un besoin urgent. Sur cette nippe-là vous auriez peu d'argent. Un peu plus, la chose était dans le dictionnaire avec la manière de s'en servir. » <Séance du jeudi 24 décembre 1846 p.684>
« Le prétendu dictionnaire historique de la langue que fait en ce moment l'Académie est le chef-d'oeuvre de la puérilité sénile. » <13 août 1847 p.644>
Anatole FRANCE / Les opinions de M. Jérôme Coignard (1893) / OEuvres II / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1987
« La Compagnie se résigna vite à consigner dans un gros dictionnaire les progrès de l'usage. C'est l'unique soin des Immortels. Quand ils y ont vaqué, ils trouvent tout loisir de se récréer entre eux. Il leur faut pour cela des compagnons plaisants, faciles, gracieux, des confrères aimables, des hommes entendus et sachant le monde. Ce n'est pas toujours le cas des grands talents. Le génie est parfois insociable. Un homme extraordinaire est rarement un homme de ressource. L'Académie a pu se passer de Descartes et de Pascal. Qui dit qu'elle se serait aussi bien passée de M. Godeau ou de M. Conrart, ou de toute autre personne d'un esprit souple, liant et avisé ? » <p.286>
Edmond et Jules de GONCOURT / Journal (t.1) / Robert Laffont - Bouquins 1989
« Preuve en faveur du rien que peuvent les assemblées, les compagnies, les sociétés, pour les travaux, découvertes, etc., toutes les grandes choses de la pensée ou de la volonté : l'Académie française ! À peine un dictionnaire ! » <20 février 1860 p.536>
Edmond et Jules de GONCOURT / Journal (t.2) / Robert Laffont - Bouquins 1989
« Comme cette fois-ci, c'étaient deux poètes qui se présentaient en même temps à l'Académie, l'un qui s'appelle Autran, l'autre Théophile Gautier, et que l'Académie a choisie Autran, ma conviction absolue sans appel, est que l'Académie est composée en majorité de crétins ou de véritables malhonnêtes gens : je la laisse choisir. » <6 mai 1868 p.149>
Henry MARET / Pensées et opinions / Paris, Flammarion 1903 [BnF]
« Quelle drôle d'idée a l'Académie de recevoir de temps en temps des hommes d'esprit ; cela les dépayse et ils ne font plus rien qui vaille. » <p.233>
Édouard LOCKROY / Au hasard de la vie / Paris Grasset 1913 [BnF]
« On raconte qu'Alfred de Musset ne venait que de loin en loin à l'Académie. En entrant, il demandait à Pingard : - M. Victor Hugo est-il venu à l'Académie aujourd'hui ? Et quand Pingard lui répondait non : - Alors, reprenait Musset, il n'y a personne. Je m'en vais. Là-dessus, il tournait les talons et rentrait chez lui. » <p.281>
Henry BECQUE / Souvenirs d'un auteur dramatique / Bibliothèque artistique et littéraire 1895 [BnF]
« Le malheur de l'Académie est d'être un corps inutile, qui ne confère qu'un titre inutile, et que la vanité seule fait rechercher. » <p.123>
Anatole FRANCE / Le jardin d'Épicure (1894) / Calmann Lévy, Paris 1895 [BnF]
« Les vieillards tiennent beaucoup trop à leurs idées. C'est pourquoi les naturels des îles Fidji tuent leurs parents quand ils sont vieux. Ils facilitent ainsi l'évolution, tandis que nous en retardons la marche en faisant des académies. » <p.150>
Paul-Jean TOULET / Monsieur du Paur homme public / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1986
« Je voudrais [...] être de l'Académie pour en dire du mal. Car se moquer d'un salon où l'on n'est pas reçu, ça n'a pas l'air très sincère ; mais quand on en est, et surtout que le maître de la maison est un cardinal mort il y a longtemps, on peut s'en donner à coeur joie ; » <p.254>
Georges DARIEN / La Belle France (1900) / Voleurs ! / Omnibus Presses de la Cité 1994
« "L'Académie est un salon." L'Académie n'est pas un salon ; c'est une bourriche. À part Anatole France, doué d'un haut talent, et deux ou trois autres qui, sans grandes idées, n'écrivent pas positivement mal, il n'y a là qu'une collection d'huîtres ; et d'huîtres contaminées. "Nous sommes des honnêtes gens." Vous n'êtes pas des honnêtes gens ; vous êtes de glorioleuses canailles. Et ce serait un bonheur pour le pays que la disparition de cet antre de la sottise servile, du pédantisme hypocrite, lâche et féroce - de ce conservatoire de la cruelle et ridicule vanité nationale. » <p.1203>
Léon DAUDET / Le stupide XIXe siècle (1922) / Souvenirs et polémiques / Robert Laffont - Bouquins 1992
« J'ai assisté de près à de nombreuses brigues pour l'Académie française et pour l'Académie des sciences et j'en ai conservé à la fois un souvenir amusé et écoeuré. Il est étonnant que des hommes d'un certain âge et d'un certain poids se soumettent à d'aussi humiliantes démarches, ou acceptent d'être confondus avec la tourbe de faux lettrés et de faux savants qui encombre ces prétendus sanctuaires des Lettres et des Sciences. Une fois admis, après bien des rebuffades, et pleins de rancoeur, ces gens de valeur prennent en grippe les collègues qui les ont ainsi humiliés et ne songent plus qu'à se venger d'eux, ou à susciter des candidats qu'ils pourront, à leur tour, brimer et molester. D'où un sadisme sénilo-académique qui mériterait une étude à part. » <p.1279>
Emil CIORAN / Carnets 1957-1972 / nrf Gallimard 1997
« Hier, élection d'Eugène [Ionesco] à l'Académie. Il m'a dit, terrifié : "C'est pour toujours, pour l'éternité." - Je le rassure : "Mais non, pense à Pétain, à Maurras, à Abel Hermant et à quelques autres. Ils en furent chassés. Tu auras peut-être aussi l'occasion de commettre quelque acte de trahison." - Lui : "Il y a donc de l'espoir." » <23 janvier 1970 p. 787>
Paul MORAND / Journal inutile 1968-1972 / nrf Gallimard 2001
« Lorsque le Dictionnaire de l'Académie en arrivera au mot Vertu, je ne serai plus de ce monde. Jeudi prochain, nous serons au mot Cul. » <15 novembre 1971, p.616>
« Que le bel uniforme vert (me disais-je hier, en regardant l'Institut) cache de jambes mécaniques, de ceintures herniaires, de fausses dents et de tibias démontables... » <17 novembre 1972, p.828>
Pierre DESPROGES / Vivons heureux en attendant la mort / Ed. du Seuil 1983
« Quand ils ont fini d'écrire des conneries dans le dictionnaire, à quoi servent les académiciens ? À rien. À rien du tout. Non mais regardez-les ! Voyez ces tristes spécimens de parasites de la société qui trémoussent sans vergogne leur arrogance de nantis sur les fauteuils vermoulus de l'Académie française. Voyez-les glandouiller sans honte à l'heure même où des millions de travailleurs de ce pays suent sang et eau dans nos usines, dans nos bureaux, et même dans nos jardins où d'humbles femmes de la terre arrachent sans gémir à la glèbe hostile les glorieuses feuilles de scarole destinées à décorer les habits verts de ces plésiosaures diminués qui souillent les bords de Seine du Quai Conti du chevrotement comateux de leurs pensées séniles. N'avez-vous pas honte, messieurs, de vous commettre ainsi dans cette assemblée de vieilles tiges creuses, rien dans la cafetière, tout dans la coupole. N'avez-vous pas honte, à vos âges, des grands garçons comme vous, de vous déguiser périodiquement en guignols vert pomme avec des chapeaux à plumes à la con et une épée de panoplie de Zorro ? Est-il Dieu possible que des écrivains aussi sérieux que vous passent leur temps à se demander s'il y a deux n à zigounette ? » <p.133>
Frédéric DARD / Les pensées de San-Antonio / Le cherche midi éditeur 1996
« Victor Hugo, de l'Académie française (on ne le précise jamais, car l'Académie n'est glorieuse que pour ceux qui ne le sont pas). » <p.120>
Michel AUDIARD / Audiard par Audiard / Ed. René Chateau 1995
« Se disant homme d'épée mais interdisant les duels, se disant ami des lettres mais fondant l'Académie Française, Armand Jean du Plessis, Cardinal de Richelieu était un personnage plein de contradictions. » <Les Trois Mousquetaires, p.109>