« La mort n'a aucun rapport avec nous ; car ce qui est dissous est insensible, et ce qui est insensible n'a aucun rapport avec nous. » <2 p.209>
SÉNÈQUE / Lettres à Lucilius / Robert Laffont - Bouquins 1993
« "Exerce-toi à mourir." C'est me dire : exerce-toi à être libre. Qui sait mourir ne sait plus être esclave : il s'établit au-dessus, du moins en dehors de tout despotisme. Que lui font le cachot, les gardes, les verrous ? Il a toujours porte libre. Une seule chaîne nous tient à l'attache : l'amour de la vie. Sans rejeter trop loin cette passion, il est bon de la réduire assez pour que, si la circonstance l'exige, rien ne nous retienne ni ne nous empêche d'être prêts à faire sur l'heure ce qu'il faudra faire tôt ou tard. » <III Lettre 26-10 p.667>
« Si je ne m'abuse, Lucilius, notre erreur est de croire que la mort ne vient qu'après la vie, alors qu'elle a précédé, comme elle suivra. Tout ce qui fut avant nous, c'est la mort. Qu'importe, en effet, de ne point commencer ou de finir, puisque l'un et l'autre a pour aboutissant l'état de non-être ? » <VI Lettre 54-5 p.725>
« [...] il est plus beau pour l'homme d'apprendre à mourir qu'à tuer. » <VIII Lettre 70-26 p.784>
LIE-TSEU / Le Vrai Classique du vide parfait / Philosophes taoïstes / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1961
« Tseu-Kong, fatigué de l'étude, dit à Tchong-ni : "Je désire trouver le repos." Tchong-ni dit : "La vie ne connaît pas de repos." L'autre reprit : "Alors, il n'y a pas de repos pour moi ? - Certes oui, dit Tchong-ni, regardes là dans ce champ ces tombeaux, et reconnais où se trouve le repos." Tseu-kong dit : "Grande est la mort, repos de l'homme supérieur, soumission des médiocres !" Tchong-ni ajouta : "Sseu, tu parles bien. Les hommes, en général, n'aiment parler de la vie qu'en termes de plaisir et ils oublient son amertume. Ils savent que la vieillesse est décrépitude, et ils oublient qu'elle apporte aussi la paix. Ils reconnaissent la tristesse de la mort et ils oublient qu'elle donne la paix." » <p.374>
Michel de MONTAIGNE / Essais / Garnier 1962
« Il est incertain où la mort nous attende, attendons la partout. La premeditation de la mort est premeditation de la liberté. Qui a apris à mourir, il a desapris à servir. Le sçavoir mourir nous afranchit de toute subjection et contrainte. Il n'y a rien de mal en la vie pour celuy qui a bien comprins que la privation de la vie n'est pas mal. » <t.1 p.88 livre I chap.XX>
« Quelle resverie est-ce de s'attendre de mourir d'une defaillance de forces que l'extreme vieillesse apporte, et de se proposer ce but à nostre durée, veu que c'est l'espece de mort la plus rare de toutes et la moins en usage ? Nous l'appellons seule naturelle, comme si c'estoit contre nature de voir un homme se rompre le col d'une cheute, s'estoufer d'un naufrage, se laisser surprendre à la peste ou à une pleuresie, et comme si nostre condition ordinaire ne nous presentoit à tous ces inconvenients. Ne nous flatons pas de ces beaux mots : on doit, à l'aventure, appeller plustost naturel ce qui est general, commun et universel. Mourir de vieillesse, c'est une mort rare, singuliere et extraordinaire, et d'autant moins naturelle que les autres ; c'est la derniere et extreme sorte de mourir ; plus elle est esloignée de nous, d'autant est elle moins esperable ; c'est bien la borne au delà de laquelle nous n'irons pas, et que la loy de nature a prescript pour n'estre poinct outrepassée ; mais c'est un sien rare privilege de nous faire durer jusques là. » <t.1 p.360 livre I chap.LVII>
LA ROCHEFOUCAULD / Maximes / Garnier 1967
« Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement. » <M 26 p.13>
« Après avoir parlé de la fausseté de tant de vertus apparentes, il est raisonnable de dire quelque chose de la fausseté du mépris de la mort. J'entends parler de ce mépris de la mort que les païens se vantent de tirer de leurs propres forces, sans l'espérance d'une meilleure vie. Il y a différence entre souffrir la mort constamment, et la mépriser. Le premier est assez ordinaire ; mais je crois que l'autre n'est jamais sincère. On a écrit néanmoins tout ce qui peut le plus persuader que la mort n'est point un mal ; et les hommes les plus faibles aussi bien que les héros ont donné mille exemples célèbres pour établir cette opinion. Cependant je doute que personne de bon sens l'ait jamais cru ; et la peine que l'on prend pour le persuader aux autres et à soi-même fait assez voir que cette entreprise n'est pas aisée. On peut avoir divers sujets de dégoût dans la vie, mais on n'a jamais raison de mépriser la mort ; ceux mêmes qui se la donnent volontairement ne la comptent pas pour si peu de chose, et ils s'en étonnent et la rejettent comme les autres, lorsqu'elle vient à eux par une autre voie que celle qu'ils ont choisie. L'inégalité que l'on remarque dans le courage d'un nombre infini de vaillants hommes vient de ce que la mort se découvre différemment à leur imagination, et y paraît plus présente en un temps qu'en un autre. Ainsi il arrive qu'après avoir méprisé ce qu'ils ne connaissent pas, ils craignent enfin ce qu'ils connaissent. Il faut éviter de l'envisager avec toutes ses circonstances, si on ne veut pas croire qu'elle soit le plus grand de tous les maux. Les plus habiles et les plus braves sont ceux qui prennent de plus honnêtes prétextes pour empêcher de la considérer. Mais tout homme qui la sait voir telle qu'elle est, trouve que c'est une chose épouvantable. La nécessité de mourir faisait toute la constance des philosophes. Ils croyaient qu'il fallait aller de bonne grâce où l'on ne saurait s'empêcher d'aller ; et, ne pouvant éterniser leur vie, il n'y avait rien qu'ils ne fissent pour éterniser leur réputation, et sauver du naufrage ce qui n'en peut être garanti. Contentons-nous pour faire bonne mine de ne nous pas dire à nous-mêmes tout ce que nous en pensons, et espérons plus de notre tempérament que de ces faibles raisonnements qui nous font croire que nous pouvons approcher de la mort avec indifférence. La gloire de mourir avec fermeté, l'espérance d'être regretté, le désir de laisser une belle réputation, l'assurance d'être affranchi des misères de la vie, et de ne dépendre plus des caprices de la fortune, sont des remèdes qu'on ne doit pas rejeter. Mais on ne doit pas croire aussi qu'ils soient infaillibles. » <M 504 p.113>
Blaise PASCAL / Pensées / OEuvres complètes / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1954
« Le dernier acte est sanglant, quelque belle que soit la comédie en tout le reste : on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais. » <227 p.1148>
Henry de MONTHERLANT / Un voyageur solitaire est un diable / Essais / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1963
« Pourquoi me souvenir que je suis poussière ? C'est une des forces de l'esprit humain, et non une de ses faiblesses, que la pensée de la mort lui soit présente si rarement. » <Trois jours au Montserrat, p.397>
Jean de LA FONTAINE / Fables / La Pochothèque LdP 2000
« Le trépas vient tout guérir ; Mais ne bougeons d'où nous sommes. Plutôt souffrir que mourir, C'est la devise des hommes. » <Livre premier XVI La mort et le bûcheron p.70>
Jean de LA BRUYÈRE / Les Caractères / OEuvres / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1951
« Toute plaisanterie dans un homme mourant est hors de sa place ; si elle roule sur de certains chapitres, elle est funeste. C'est une extrême misère que de donner à ses dépens à ceux que l'on laisse le plaisir d'un bon mot. » <p.451 XVII (8)>
André-François BOUREAU-DESLANDES / Réflexions sur les grands hommes qui sont morts en plaisantant / Rochefort J Lenoir 1755 [BnF]
« Le plus beau trait d'indifférence qu'on puisse recueillir des Anciens, regarde le Philosophe Pyrrhon, l'un des plus grands défenseurs de l'Art de douter. Il soutenait un jour que c'était presque la même chose, de vivre ou de mourir ; et pourquoi ne mourrez-vous pas, lui dit quelqu'un ? C'est, répondit-il, parce que je ne vois aucune différence entre la vie et la mort. Cette répartie est naturelle, et les beautés qui sont toutes de la Nature, frappent du premier abord. » <p.43>
MONTESQUIEU / Mes pensées / OEuvres complètes I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1949
« Il faut bien prendre garde d'inspirer aux hommes trop de mépris de la mort : par là, ils échapperoient au Législateur. » <1736 p.1416>
« Quelle idée pour un prince mourant de penser que son malheur va faire la félicité publique ! Cette idée fait si bien le désespoir des tyrans que plusieurs, pour empêcher que le jour de leur mort ne fût un jour de joie, ont ordonné que l'on exterminât, ce jour-là, une partie de leur peuple, afin d'empêcher que l'autre ne pût se réjouir. » <1856 p.1442>
CHAMFORT / Maximes et Pensées, Caractères et Anecdotes / Garnier-Flammarion 1968
« Pourquoi les hommes sont-ils si sots, si subjugués par la coutume ou par la crainte de faire un testament, en un mot, si imbéciles, qu'après eux ils laissent aller leurs biens à ceux qui rient de leur mort plutôt qu'à ceux qui la pleurent ? » <75 p.65>
« Vivre est une maladie dont le sommeil nous soulage toutes les 16 heures. C'est un palliatif. La mort est le remède. » <113 p.75>
« Une femme âgée de 90 ans disait à M. de Fontenelle, âgé de 95 : "La mort nous a oubliés. - Chut !" lui répondit M. de Fontenelle, en mettant le doigt sur sa bouche. » <925 p.258>
« On demandait à M. de Fontenelle mourant : "Comment cela va-t-il ? - Cela ne va pas, dit-il ; cela s'en va. » <937 p.260>
Jean-Louis-Auguste COMMERSON / Pensées d'un Emballeur (2) / Martinon 1852
« Quand je passe près d'un corbillard, j'ai toujours peur que les chevaux ne prennent le mors aux dents. » <p.92>
Charles BAUDELAIRE / Le Spleen de Paris / OEuvres complètes I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1975
« [...] il y a toujours dans le deuil du pauvre quelque chose qui manque, une absence d'harmonie qui le rend plus navrant. Il est contraint de lésiner sur sa douleur. Le riche porte la sienne au grand complet. » <p.293>
« Le charme de la mort n'existe que pour les courageux. » <II p.347>
Friedrich NIETZSCHE / Humain, trop humain. (1878-1879) / OEuvres I / Robert Laffont - Bouquins 1990
« Il est indifférent comment on meurt. - La manière dont un homme pense à la mort, à l'apogée de sa vie et pendant qu'il possède la plénitude de sa force, est très parlante et significative pour ce que l'on appelle son caractère ; mais l'heure de sa mort par elle-même, son attitude sur le lit d'agonie, n'entrent presque pas en ligne de compte. L'épuisement de la vie qui décline, surtout quand ce sont des vieilles gens qui meurent, l'alimentation irrégulière et insuffisante du cerveau pendant cette dernière époque, ce qu'il y a parfois de très violent dans les douleurs, la nouveauté de cet état maladif dont on n'a pas encore l'expérience, et trop fréquemment un accès de crainte, un retour à des impulsions superstitieuses, comme si la mort avait une grande importance et s'il fallait franchir des ponts d'espèce très épouvantable, - tout cela ne permet pas d'utiliser la mort comme un témoignage sur le vivant. Aussi n'est-il point vrai que, d'une façon générale, le mourant soit plus sincère que le vivant : au contraire, presque chacun est poussé par l'attitude solennelle de son entourage, les effusions sentimentales, les larmes contenues ou répandues, à une comédie de vanité, tantôt consciente, tantôt inconsciente. » <88 p.731>
Thomas HOBBES / Léviathan (1651) / Dalloz 1999
« [...] la compétition dans la poursuite des éloges incline à révérer l'antiquité : car on rivalise avec les vivants, non avec les morts ; à ceux-ci, on attribue plus que leur dû, afin de pouvoir mieux obscurcir la gloire de ceux-là. » <Partie I ch.xi De la variété des moeurs, p.96>
« On ne se souvient guère des morts que pour en incommoder les vivants. » <p.2>
Jules RENARD / Journal / Robert Laffont - Bouquins 1990
« Il est aussi utile à un peuple de craindre la guerre qu'à un individu, la mort. » <13 mars 1890 p.45>
« La mort des autres nous aide à vivre. » <5 octobre 1892 p.110>
« Soyez tranquille ! Nous qui avons peur de la mort, nous mettons toute notre coquetterie à bien mourir. » <3 janvier 1894 p.154>
« Et puis, il y a la mort. Vous ne songez donc jamais à la mort, et que nous allons tous pourrir ? » <25 janvier 1894 p.158>
« Il ne faut pas sournoisement respecter les morts. Il faut traiter leurs images en amies et aimer tous les souvenirs qui nous viennent d'eux. Il faut les aimer pour eux-mêmes et pour nous, dût-on déplaire aux autres. » <22 juillet 1894 p.188>
« Quand on croit qu'il y aura beaucoup de monde à un enterrement, on y va, et ça finit par faire beaucoup de monde. » <17 novembre 1897 p.345>
« Comme le souvenir que laisse un mort est supérieur à sa vie ! Il n'y a pas de déchets. » <12 juillet 1898 p.389>
« C'est commode un enterrement. On peut avoir l'air maussade avec les gens : ils prennent cela pour de la tristesse. » <30 décembre 1899 p.440>
« Ceux qui ont le mieux parlé de la mort sont morts. » <9 août 1900 p.469>
« Il y a des enterrements de première classe comme si on allait au Paradis par le chemin de fer. » <10 septembre 1903 p.669>
« La mort est mal faite. Il faudrait que nos morts, à notre appel, reviennent, de temps en temps, causer un quart d'heure avec nous. Il y a tant de chose que nous ne leur avons pas dites quand ils étaient là ! » <10 octobre 1903 p.678>
« Tous les matins, en se levant, on devrait dire : "Chic ! je ne suis pas encore mort !" » <5 décembre 1903 p.685>
« Héritage. La mort nous prend un parent, mais elle le paie, et il ne nous faut pas beaucoup d'argent pour qu'elle se fasse pardonner. » <30 mai 1901 p.524>
« Mourir, c'est éteindre le monde. » <6 août 1906 p.837>
Anatole FRANCE / L'Île des Pingouins (1908) / Au tournant du siècle / Omnibus 2000
« Les morts n'ont de vie que celle que leur prêtent les vivants. » < Livre III Ch.6 p.642>
Paul MASSON / Pensées d'un Yoghi / Paris, L.Vanier 1896 [BnF]
« La mort est le meilleur médecin. Une visite lui suffit. » <116 - p.28>
Léon BLOY / Quatre ans de captivité à Cochons-sur-Marne / Journal I / Robert Laffont - Bouquins 1999
« Devise d'un vieux cadran solaire : "Il est plus tard que vous ne croyez." » <13 septembre 1901, p.390>
Léon BLOY / L'Invendable / Journal I / Robert Laffont - Bouquins 1999
« On parlait des morts sans beauté. "Les plus fréquentes, nous a dit un prêtre, sont les morts de prêtres. Presque tous se désespèrent de mourir et les confrères n'osent pas leur parler de Dieu." Épouvantable ! » <27 juin 1905, p.562>
Léon BLOY / Exégèse des lieux communs / Mercure de France 1968
On doit le respect aux morts.
« Il est inutile de respecter les vivants, à moins qu'ils ne soient les plus forts. Dans ce cas, l'expérience conseille plutôt de lécher leurs bottes, fussent-elles merdeuses. Mais les morts doivent être respectés. » <p.85>
Les morts ne peuvent pas se défendre. « Quelle bêtise ou quelle hypocrisie ! Comment donc ! mais ils se défendent précisément par le respect qui leur est dû et qui ne permet pas qu'on les touche. Imagine-t-on une meilleure défense ? Elle est d'autant plus sûre qu'une incertitude continuelle plane sur eux. Ils ont si souvent, je ne me lasse pas de le répéter, l'air de vivre, et on les enterre d'une si drôle de façon !... Essayez, par exemple, de pisser contre la statue de Gambetta et vous verrez sur-le-champ s'épaissir, se coaguler, se condenser et finalement apparaître, sous la forme de la répression la plus exaltée, toutes les sales ombres intéressées au prestige de cette abominable charogne. J'appelle ça se défendre. » <p.86>
Pas de nouvelles, bonnes nouvelles.
« Voilà qui est clair et il faut renoncer à l'exercice de la raison ou conclure de bonne foi que tout va bien du côté des morts, puisqu'ils ne donnent jamais de leurs nouvelles. » <p.268>
Mourir de sa belle mort. « Le plus savant des dictionnaires nous affirme que cela signifie mourir de mort naturelle. Nous voilà bien avancés ! Cela implique simplement qu'il peut y avoir des cas de mort surnaturelle, mais il paraît difficile de les préciser, surtout dans la société bourgeoise où je n'ai jamais eu l'occasion d'en observer. On y meurt ordinairement de maladie et jusqu'à l'abolition du sens des mots, je croirai que toute maladie physique est naturelle. Le choléra, la fièvre jaune, l'apoplexie, la rage, et, sans exception, toutes les maladies pouvant provoquer la mort sont parfaitement naturelles. De même, si vous êtes écrasé par un autobus ou qu'une cheminée vous tombe sur la tête, il est naturel que la mort s'ensuive. De même encore si vous êtes empoisonné, revolvérisé, poignardé, noyé ou guillotiné. Impossible de s'exprimer autrement. » <p.273-274>
Voir la mort en face.
« Tous les héros de roman-feuilleton sont habitués à voir la mort en face. Faut-il croire qu'aucun d'eux ne l'a jamais vue de profil ? C'est peut-être plus effrayant. » <p.298>
« Le cimetière est un jardin où l'on vient apporter des fleurs une fois par an. » <p.298>
Henri DUVERNOIS / L'Esprit de Henri Duvernois / nrf Gallimard 1928
« Les albums de photographies, c'est comme les allées de cimetière : les gens sont alignés côte à côte pour l'éternité, sans se connaître. » <Théâtre - Nounette p.91>
Paul-Jean TOULET / Les trois impostures / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1986
« Si tu as peur de la mort, n'écoute pas ton coeur battre la nuit. » <300 p.202>
Sigmund FREUD / Essais de psychanalyse / Petite Bibliothèque Payot (44) 1973
« Rappelons-nous le vieil adage : si vis pacem, para bellum. Si tu veux maintenir la paix, sois toujours prêt à la guerre. Il serait temps de modifier cet adage et de dire : si vis vitam, para mortem. Si tu veux pouvoir supporter la vie, soit prêt à accepter la mort. » <Considérations actuelles sur la guerre et sur la mort, 1915 p.267>
Paul VALÉRY / Mauvaises pensées et autres / OEuvres II / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1960
« Les méditations sur la mort (genre Pascal) sont le fait d'hommes qui n'ont pas à lutter pour leur vie, à gagner leur pain, à soutenir des enfants. L'éternité occupe ceux qui ont du temps à perdre. Elle est une forme du loisir. » <p.841>
Paul VALÉRY / Cahiers I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1973
« Perdre la vie - c'est-à-dire perdre l'avenir. - N'es-tu pas l'avenir de tous les souvenirs qui sont en toi ? l'avenir d'un passé ? » <p.1318>
Paul LÉAUTAUD / Journal littéraire / Mercure de France 1986
« Peut-on se plaire aux idées dont Barrès s'est fait le champion, dont il s'est fait, pour parler plus justement, un tremplin, ces dernières années ? La leçon des morts, l'enseignement des morts, l'obéissance aux morts, la terre et les morts, la petite patrie, etc. Idées inintelligentes, philosophie d'esclave. L'enseignement des morts ! N'est-ce pas assez de les subir en soi forcément, sans encore se plier volontairement à eux ? Je pense au mot de Goethe : "En avant, par-delà les tombeaux." Véritable cri d'un homme qui voulait être et savait être un homme. Mes morts à moi-même ne m'intéressent déjà pas. Je veux dire celui que j'étais hier, que j'ai été auparavant. Ce n'est pas pour me soumettre aux morts réels. Je doute de l'intelligence d'un homme, d'inventer des niaiseries pareilles. » <16 janvier 1907 I p.369>
« Valéry m'a raconté un bien beau mot, un mot vraiment admirable du père de M. Édouard Lebey, le premier Lebey, le fondateur de la fortune. Mot d'un homme habitué à pouvoir tout payer, tout acheter. Malade, et sentant que la fin arrivait, il se mit à dire : "Quel dommage qu'il faille mourir soi-même !" Il aurait voulu que là aussi on pût payer quelqu'un pour se faire remplacer. » <11 septembre 1915 I p.965>
« Nous parlions ce soir, Valette et moi, de ce mouvement de gratter leur drap avec les mains qu'ont tous les moribonds, ou presque tous. Je lui disais que les animaux font de même, au moins les chiens et les chats, dont j'ai vu mourir un grand nombre. Un chien, un chat, à la minute de la mort, s'ils sont sur le sol d'un jardin, grattent le sol de leurs pattes de devant, s'ils sont sur le sol d'un jardin, grattent le parquet, s'ils sont sur un lit, grattent l'étoffe sur laquelle ils sont. Que signifie ce geste, ce mouvement, qu'ont ainsi les humains et les animaux ? Il a sûrement la même origine animale, purement instinctive. » <23 mai 1927 I p.1955>
Paul LÉAUTAUD / Passe-temps / OEuvres / Mercure de France 1988
« Le chagrin pour les morts est une niaiserie. Une illusion également. C'est sur nous-mêmes que nous pleurons, sur le vide ou la privation qu'ils nous laissent. Eux, ils sont morts, c'est-à-dire : ils ne sont plus rien. Pleurer sur eux ne rime à rien. » <p.218>
Paul LÉAUTAUD / Propos d'un jour / OEuvres / Mercure de France 1988
« Quel dommage que la mort soit d'abord le non-être, et ensuite le répugnant phénomène physique qu'elle est ! Enfermé tranquillement, douillettement, dans cette boîte, sans besoins, sans soucis, sans désirs, dans un éternel farniente, une rêverie sans fin, à se représenter tous ces imbéciles qui s'agitent au-dessus ? Ce serait délicieux ! » <p.371>
ALAIN / Propos I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1956
« C'était dans le haut du village, d'où l'on aperçoit la mer à travers les ormeaux et les pommiers. Au vieux marin que je rencontrai, je fis la politesse de dire que je me sentais bien dans cet air-là, et c'était vrai. Mais lui reprit cette idée comme un homme qui cause, et qui laisse là le reste. Sa manière était de me quitter en tournant la tête vers moi, et puis de revenir, comme ayant encore une dernière chose à dire. "Vous êtes donc, me dit-il, comme ce sacristain de Paris, si fâché de s'en retourner, et qui disait qu'avec cet iode dans les poumons, cet iode de la mer, on se sent rajeuni." Ici quelque remous écarta l'homme ; puis il revint, tout confident : "Il me disait qu'on ne peut mourir ici ; je lui répondis qu'on meurt partout." Nouvelle feinte de départ, mais le conteur regardait ici et là, comme pour chercher des témoins. Toute la scène allait jouer sur ce mouvement de partir et de revenir. Ce fut bref. "Vous savez ce que disait le terrien ; il disait au marin : "Où donc sont morts tes grands-parents et tes parents ?" - "Ils sont morts en mer, dit le marin." - "Et tu oses t'embarquer ! dit le terrien." Une fausse sortie. Là-dessus le marin hausse les épaules et va s'en aller ; mais il revient et demande : "Et toi, terrien, où sont donc morts tes grands-parents et tes parents ?" Le terrien répond qu'ils sont morts dans leur lit "Et, dit le marin, tu oses te coucher !" II s'en alla, cette fois, sans autre commentaire. » <1 octobre 1935 p.1282>
Sacha GUITRY / Si j'ai bonne mémoire / Cinquante ans d'occupations / Omnibus Presses de la Cité 1993
« Nous avions un parent pour lequel mon père avait peu d'amitié. Le pauvre homme mourut un jour - et nous l'avons accompagné jusqu'à sa dernière demeure qui était extrêmement éloignée de la précédente. Il avait fallu se lever de grand matin, il faisait extrêmement chaud et nous marchions depuis bientôt une heure, lorsque mon père se tourna vers moi et me dit, à voix basse, d'une inexprimable manière : - Je commence à le regretter ! » <p.360>
Sacha GUITRY / Mes Médecins / Cinquante ans d'occupations / Omnibus Presses de la Cité 1993
« Il n'y a pas de belle mort. Il y en a qui sont belles à raconter - mais, celles-là, ce sont les morts des autres. Combien de fois l'ai-je entendue cette phrase : - Je voudrais mourir d'un seul coup sans souffrir et sans avoir connu les infirmités de l'extrême vieillesse. Eh ! Bien, moi, je voudrais mourir le plus tard possible - non seulement de vieillesse, mais encore avec une lenteur infinie, car n'ayant jamais eu le temps de vivre, je voudrais bien avoir du moins le temps de mourir. Oui, je réclame une mort lente et toutes les infirmités possibles. Il me faudra bien cela pour que je parte sans trop de regrets. » <p.557>
Léon DAUDET / Souvenirs / Robert Laffont - Bouquins 1992
« La mort sans l'Église est sans grandeur. Elle a l'air un peu d'une formalité administrative, d'une opération d'arithmétique physiologique, d'une soustraction charnelle : Un tel y était. Il n'y est plus. Ça fait moins un. À qui le tour ?... » <p.68>
Jean COCTEAU / Le Rappel à l'ordre / Romans, Poésies, OEuvres diverses / La Pochothèque LdP 1995
« Cent ans après ma mort, je me reposerai, fortune faite. » <p.499>
Jean COCTEAU / La difficulté d'être / Romans, Poésies, OEuvres diverses / La Pochothèque LdP 1995
« Après la mort de Jean Giraudoux je publiai une lettre d'adieu qui se terminait par : "Je ne serai pas long à te rejoindre." On me gronda beaucoup sur cette phrase qu'on trouvait pessimiste empreinte de découragement. Il n'en était rien. Je voulais dire que si même je dois durer jusqu'à cent ans, c'est quelques minutes. Mais peu de gens veulent l'admettre, et que nous nous occupons et jouons aux cartes dans un express qui roule vers la mort. » <p.918>
LIN Yutang / L'importance de vivre / Ed. Philippe Picquier 2004
« Quiconque est sage, et a vécu assez longtemps pour assister aux changements de modes, de morales et de politiques, devrait être parfaitement satisfait de se lever de son siège et de dire "C'était un bon spectacle" pendant que le rideau tombe. » <p.51>
Paul LEVY / Quelques aspects de la pensée d'un mathématicien / Albert Blanchard 1970
« Quant à la peur de la mort, elle fait partie des réflexes de défense que la nature a mis en nous. Mais est-elle logique ? Nous nous résignons à l'idée que le monde a existé sans nous jusqu'à notre naissance. L'idée qu'il continuera après nous est-elle plus effrayante ? Je ne le crois pas. Je n'ai pas la peur abstraite de la mort, et je m'étonne de voir à quel point l'humanité est dominée par cette peur. » <p.180>
Pierre DAC / Les Pensées / Le cherche midi éditeur 1972
« La mort n'est, en définitive, que le résultat d'un défaut d'éducation puisqu'elle est la conséquence d'un manque de savoir vivre. » <p.48>
Philippe BOUVARD / Maximes au minimum / Robert Laffont 1984
« Je m'étonne toujours que des êtres également menacés par la mort se fassent la vie aussi difficile. » <p.85>
« Ce qu'il y a de plus terrible dans la mort, c'est de ne pas pouvoir aller à ses rendez-vous du lendemain. » <p.94>
Pierre DESPROGES / Vivons heureux en attendant la mort / Ed. du Seuil 1983
« Qu'es-tu devenue, toi que j'aimais, qui fus pimpante et pétillante, bouche de fraise et nez coquin, qu'est-ce que tu fous sous ton cyprès ? Qu'es-tu devenue ? Oh je sais. Tu es devenue : azote 12 %, acide phosphorique 17 %, sels de phosphate 31 %, âme zéro. » <p.103>
Léo CAMPION / Le petit Campion - Lexique encyclopédique illustré / J & R Sennac Paris 1947
« Feu : Décédé. Dès qu'on dit feu Untel, c'est qu'Untel s'est éteint. » <n.p.>
« Mort : Occasion posthume de faire parler de soi. Aux condamnés à mort, on donne de l'eau-de-vie. » <n.p.>
Emil CIORAN / Sur les cimes du désespoir / OEuvres / Quarto Gallimard 1995
« Lamentable faiblesse que de vouloir vivre et mourir en société : y a-t-il une consolation possible à la dernière heure ? Il est bien préférable de mourir seul et abandonné, sans affectation ni faux-semblants. Je n'éprouve que dégoût pour ceux qui, à l'agonie, se maîtrisent et s'imposent des attitudes destinées à faire impression. Les larmes ne sont chaudes que dans la solitude. Tous ceux qui veulent s'entourer d'amis à l'heure de la mort le font par peur et incapacité d'affronter leur instant suprême. » <p.21>
Emil CIORAN / Le crépuscule des pensées (1940) / OEuvres / Quarto Gallimard 1995
« Le désir de mourir n'exprime parfois qu'une subtilité de notre orgueil : nous voulons nous rendre maîtres des surprises fatales de l'avenir, ne pas tomber victimes de son désastre essentiel. » <p.431>
Emil CIORAN / De l'inconvénient d'être né (1973) / OEuvres / Quarto Gallimard 1995
« Pourquoi craindre le néant qui nous attend alors qu'il ne diffère pas de celui qui nous précède, cet argument des Anciens contre la peur de la mort est irrecevable en tant que consolation. Avant, on avait la chance de ne pas exister ; maintenant on existe, et c'est cette parcelle d'existence, donc d'infortune, qui redoute de disparaître. Parcelle n'est pas le mot, puisque chacun se préfère ou, tout au moins, s'égale, à l'univers. » <p.1329>
Emil CIORAN / Écartèlement (1979) / OEuvres / Quarto Gallimard 1995
« Il faudrait vivre, disiez-vous, comme si l'on ne devait jamais mourir. - Ne saviez-vous donc pas que tout le monde vit ainsi, y compris les obsédés de la Mort ? » <p.1780>
Emil CIORAN / Carnets 1957-1972 / nrf Gallimard 1997
« La seule utilité des enterrements, c'est de nous permettre de nous réconcilier avec nos ennemis. » <p.104>
« Si, pour consoler les gens en deuil, on invoque si souvent les lieux communs : tout le monde meurt, les grands comme les petits, les empires et le reste, - c'est que, comme on l'a remarqué, en dehors de ces banalités, il n'y a rien qui puisse servir de consolation. » <p.173>
« L'extraordinaire argument dont Plutarque s'est servi à l'intention de sa femme après la mort de leur fille : "Pourquoi pleurer, tu n'étais pas affligée quand tu n'avais pas encore d'enfant ; maintenant que tu n'en as plus, tu en es au même point." » <30 mai 1969 p.733>
José ARTUR / Les Pensées / Le cherche midi éditeur 1993
« Un incinéré ne peut pas se retourner dans sa tombe. » <p.80>
« Pour tout croyant, la mort est une promotion. » <p.85>
Georges WOLINSKI / Les Pensées / Le cherche midi éditeur 1981
« Le premier homme qui est mort a dû être drôlement surpris. » <p.36>
COLUCHE / Pensées et anecdotes / Le cherche midi éditeur 1995
« Si j'ai l'occasion, j'aimerais mieux mourir de mon vivant ! » <p.171>
Jacques PRÉVERT / Spectacle (1951) / OEuvres complètes I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1992
« Espace vital : Une des grandes misères de l'homme c'est de ne pas pouvoir se tenir dans un espace de quatre pieds carrés. GLAISE PASCAL. » <Intermède, p.379>
Frédéric DARD / Les pensées de San-Antonio / Le cherche midi éditeur 1996
« Pascal s'est aussi bien décomposé que ceux qui ne l'ont jamais lu. » <p.183>
Philippe BOUVARD / Journal 1992-1996 / Le cherche midi éditeur 1997
« Les incessants progrès de la chirurgie, de la médecine et de la pharmacie sont angoissants : de quoi mourra-t-on dans vingt ans ? » <p.47>
« Le désespoir est à la mort ce que le beurre de cacao est au suppositoire : un excipient qui rend plus facile le passage. » <p.231>
« Les morts qu'on n'a pas vus mourir paraissent moins morts que les autres. Exemptés des souffrances de l'agonie et de la corruption du tombeau, ce sont seulement des disparus. On a parfois l'impression qu'ils n'attendent qu'une occasion pour réapparaître. » <p.237>
« Et si le bien qu'on dit toujours des disparus s'expliquait par la certitude qu'ils ne feront plus aucun mal ? » <p.247>
Paul MORAND / Journal inutile 1968-1972 / nrf Gallimard 2001
« Mourir, c'est comme de sauter d'un train en marche ; on ne voit plus que les trois feux rouges du dernier wagon, qui s'éloigne. Ça continue sans vous, sans un instant de retard. » <2 septembre 1969, p.259>
Jean-Michel RIBES / Sursauts, brindilles et pétard / Grasset 2004
« Plus on avance dans l'âge moins les enterrements sont impressionnants. » <p.117>