Paul Henri Dietrich baron d'HOLBACH / La Morale universelle (II) / Amsterdam M.-M. Rey 1776
« Celui qui n'a rien que ses bras, n'a point à proprement parler de patrie, il est bien partout où il trouve les moyens de subsister ; au lieu que l'homme opulent peut être utile à bien des gens, est en état d'assister sa patrie, au destin de laquelle il se trouve intimement uni par ses possessions, dont la conservation dépend de celle de la société. Tandis qu'au siège de Corinthe les habitants s'empressaient à repousser l'ennemi par toutes sortes de moyens, Diogène, pour se moquer de leurs embarras, s'amusait follement à remuer son tonneau. » <IV viii p.202>
Jonathan SWIFT / Pensées sur divers sujets loraux et divertissants / OEuvres / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1965
« La loi, dans un pays libre, est ou devrait être la résolution de la majorité des propriétaires fonciers. » <p.578>
Victor HUGO / Choses vues / Histoire / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1987
« Ne soyons plus anglais ni français ni allemands. Soyons européens. Ne soyons plus européens, soyons hommes. - Soyons l'humanité. Il nous reste à abdiquer un dernier égoïsme : la patrie. » <p.1313>
Gustave FLAUBERT / Correspondance I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1973
« Je ne suis pas plus moderne qu'ancien, pas plus Français que Chinois, et l'idée de la patrie c'est-à-dire l'obligation où l'on est de vivre sur un coin de terre marqué en rouge ou en bleu sur la carte et de détester les autres coins en vert ou en noir m'a paru toujours étroite, bornée et d'une stupidité féroce. » <À Louise Colet, 26 août 1946 p.314>
Ernest RENAN / L'Avenir de la science, Pensées de 1848 (1890) / GF 765 Flammarion 1995
« La perfection de l'humanité ne sera pas l'extinction, mais l'harmonie des nationalités : les nationalités vont bien plutôt se fortifiant que s'affaiblissant ; détruire une nationalité, c'est détruire un son dans l'humanité. » <p.340>
« [...] l'homme du peuple est bien plus sensible à la gloire patriotique que l'homme plus réfléchi, qui a une individualité prononcée. Celui-ci peut se relever par lui-même, par ses talents, ses titres, ses richesses. L'homme du peuple, au contraire, qui n'a rien de tout cela, s'attribue comme un patrimoine la gloire nationale et s'identifie avec la masse qui a fait ces grandes choses. C'est son bien, son titre de noblesse, à lui. Là est le secret de cette puissante adoption de Napoléon par le peuple. La gloire de Napoléon est la gloire de ceux qui n'en ont pas d'autres. » <note 97 p.508>
Jules RENARD / Journal / Robert Laffont - Bouquins 1990
« Croire au village, c'est donner une limite à sa vie ; c'est lui croire un sens, et elle n'en a pas. C'est un peu sot de s'imaginer que nous avons une raison d'être là plutôt qu'ailleurs. Continuer nos pères, pour quoi faire ? Ils ne savaient pas. La feuille a une attache qui lui suffit. Le cerveau est nomade. Pas de petite patrie. Une fuite résignée. Être n'importe où, ne jamais consentir à se fixer comme si un point dans l'univers nous était réservé. N'ayons pas d'orgueil ! Au premier éclair de lucidité nous verrions que nous sommes dupes, et nous serions pleins de pitié pour nous mêmes. Livrons-nous à l'universelle loi d'éparpillement. Ne pas être un homme qui regarde son village avec une loupe. Rappelons-nous que ce monde n'a aucun sens. » <3 novembre 1906 p.854>
Paul LÉAUTAUD / Passe-temps / OEuvres / Mercure de France 1988
« Vous êtes nés dans ce pays et vous en êtes fier et vous lui êtes attaché. Vous seriez né dans un autre pays, vous en seriez tout aussi fier et vous lui seriez attaché de même. Mieux, même : né ici, on vous aurait aussitôt transporté dans un autre pays où vous auriez été élevé et auriez grandi ? Vous seriez de ce pays et c'est de lui que vous seriez fier et ce pays auquel vous seriez attaché. Supposez que les bruns se mettent à être fiers d'être bruns, avec une idée de prévalence, - et qui dit prévalence dit bientôt rivalité, - sur les blonds ou vice versa ? Vous voyez si vous êtes comique avec votre orgueil national et votre patriotisme : vous avez eu autant de part à être de ce pays plutôt que d'un autre, que les bruns à être bruns et les blonds à être blonds. » <p.253-254>
Ambrose BIERCE / Le Dictionnaire du Diable (1911) / Éditions Rivages 1989
« Patriotisme n. Matériau combustible susceptible de servir de torche à quiconque ambitionne d'illuminer son nom. Dans le célèbre dictionnaire du Dr. Johnson, le patriotisme est défini comme le dernier recours du scélérat. Avec tout le respect dû à un brillant quoique inférieur lexicographe, je me permets d'affirmer que c'est le premier. » <p.207>
Georges DARIEN / La Belle France (1900) / Voleurs ! / Omnibus Presses de la Cité 1994
« Le patriotisme n'est pas seulement le dernier refuge des coquins ; c'est aussi le premier piédestal des naïfs et le reposoir favori des imbéciles. » <p.1178>
Georges ELGOZY / Le Fictionnaire ou précis d'indéfinitions / Denoël 1973
« Patriotisme : seule forme avouable de xénophobie. » <p.257>
Anatole FRANCE / L'Humanité N° 6688 (18 juillet 1922) [BnF]
« On croit mourir pour la patrie ; on meurt pour des industriels. » <p.1>
Jean COCTEAU / Journal (1942-1945) / Gallimard 1989
« Une patrie c'est la rencontre d'hommes qui se trouvent instantanément au même niveau. » <12 mars 1942, p.31>
Emil CIORAN / Écartèlement (1979) / OEuvres / Quarto Gallimard 1995
« Un homme qui se respecte n'a pas de patrie. Une patrie, c'est de la glu. » <p.1456>
Emil CIORAN / Aveux et anathèmes (1987) / OEuvres / Quarto Gallimard 1995
« On n'habite pas un pays, on habite une langue. Une patrie, c'est cela et rien d'autre. » <p.1651>
Henry de MONTHERLANT / L'équinoxe de septembre / Essais / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1963
« La patrie, c'est le pays où nous nous faisons comprendre à demi-mot ; où aucune des incidentes de la conversation ne nous échappe. » <Phylactères, p.781>