Blaise PASCAL / Pensées / OEuvres complètes / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1954
« Si nous rêvions toutes les nuits la même chose, elle nous affecterait autant que les objets que nous voyons tous les jours. Et si un artisan était sûr de rêver toutes les nuits, douze heures durant, qu'il est roi, je crois qu'il serait presque aussi heureux qu'un roi qui rêverait toutes les nuits, douze heures durant, qu'il serait artisan. Si nous rêvions toutes les nuits que nous sommes suivis par des ennemis, et agités par ces fantômes pénibles, et qu'on passât tous les jours en diverses occupations, comme quand on fait voyage, on souffrirait presque autant que si cela était véritable, et on appréhenderait de dormir, comme on appréhende le réveil quand on craint d'entrer dans de tels malheurs en effet. Et en effet il ferait à peu près les mêmes maux que la réalité. Mais parce que les songes sont tous différents, et qu'un même se diversifie, ce qu'on y voit affecte bien moins que ce qu'on voit en veillant, à cause de la continuité, qui n'est pourtant pas si continue et égale qu'elle ne change aussi, mais moins brusquement, si ce n'est rarement comme quand on voyage ; et alors on dit : "il me semble que je rêve" ; car la vie est un songe un peu moins inconstant. » <380 p.1188>
Jules RENARD / Journal / Robert Laffont - Bouquins 1990
« Relie par des rêves bien dirigés le travail du soir au travail du matin. » <28 octobre 1896 p.276>
Friedrich NIETZSCHE / Humain, trop humain. (1878-1879) / OEuvres I / Robert Laffont - Bouquins 1990
« Une méprise au sujet du rêve. Dans le rêve, l'homme , aux époques de civilisation informe et rudimentaire, croyait apprendre à connaître un second monde réel ; là est l'origine de toute métaphysique. Sans le rêve, on n'aurait pas trouvé l'occasion de couper le monde en deux. La division en âme et corps se rattache aussi à la plus ancienne conception du rêve, de même que la croyance à un simulacre corporel de l'âme, partant l'origine de toute croyance aux esprits, et vraisemblablement aussi de la croyance aux dieux. "Le mort continue à vivre ; car il apparait aux vivants dans le rêve" : c'est ainsi qu'on raisonna jadis, durant beaucoup de milliers d'années. » <5 p.444>
Jean COCTEAU / Journal (1942-1945) / Gallimard 1989
« Nous sommes rêvés par quelqu'un qui a un très mauvais rêve. Et il dort profondément. » <28 décembre 1944, p.596>
Paul VALÉRY / Tel Quel / OEuvres II / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1960
« Le réveil fait aux rêves une réputation qu'ils ne méritent pas. » <p.523>
« Le rêve est le phénomène que nous n'observons que pendant son absence. Le verbe rêver n'a presque pas de "présent"*. *Je rêve, tu rêves, - ce sont figures de rhétorique, car c'est un éveillé qui parle ou un candidat au réveil. » <p.728>
Paul VALÉRY / Cahiers I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1973
« Pour que l'argumentation fondée sur le rêve afin de contester la réalité du réel soit valable, il faudrait que l'on puisse traiter en rêve cette perception du réel - la simuler - et non pas seulement formuler - la possibilité dont on veut faire état. Qu'est-ce qui me prouve que je ne rêve pas ? C'est que je suis dans l'état dans lequel j'ai défini le rêve et qui définit le rêve - et que je n'en connais pas d'autre. » <Philosophie p.727>
COLUCHE / Pensées et anecdotes / Le cherche midi éditeur 1995
« On croit que les rêves sont faits pour être réalisés. C'est le problème des rêves. Les rêves sont faits pour être rêvés. » <p.202>