Blaise PASCAL / Pensées / OEuvres complètes / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1954
Imagination et entendement :
« Les exemples qu'on prend pour prouver d'autres choses, si on voulait prouver les exemples, on prendrait les autres choses pour en être les exemples ; car, comme on croit toujours que la difficulté est à ce qu'on veut prouver, on trouve les exemples plus clairs et aidant à le montrer. Ainsi, quand on veut montrer une chose générale, il faut en donner la règle particulière d'un cas ; mais si on veut monter un cas particulier, il faudra commencer par la règle générale. Car on trouve toujours obscure la chose qu'on veut prouver, et claire celle qu'on emploie à la preuve ; car , quand on propose une chose à prouver, d'abord on se remplit de cette imagination qu'elle est obscure, et, au contraire, que celle qui la doit prouver est claire, et ainsi on l'entend aisément. » <67 p.1101>
Imagination et raison :
« Imagination - C'est cette partie dominante dans l'homme, cette maîtresse d'erreur et de fausseté, et d'autant plus fourbe qu'elle ne l'est pas toujours ; car elle serait règle infaillible de vérité, si elle l'était infaillible du mensonge. Mais, étant le plus souvent fausse, elle ne donne aucune marque de sa qualité, marquant du même caractère le vrai et le faux. Je ne parle pas des fous, je parle des plus sages ; et c'est parmi eux que l'imagination a le grand droit de persuader les hommes. La raison a beau crier, elle ne peut mettre le prix aux choses. Cette superbe puissance, ennemie de la raison, qui se plaît à contrôler et à dominer, pour montrer combien elle peut en toutes choses, a établi dans l'homme une seconde nature. Elle a ses heureux, ses malheureux, ses sains, ses malades, ses riches, ses pauvres ; elle fait croire, douter, nier la raison ; elle suspend les sens, elle les fait sentir ; elle a ses fous et ses sages : et rien ne nous dépite davantage que de voir qu'elle remplit ses hôtes d'une satisfaction bien autrement pleine et entière que la raison. Les habiles par imagination se plaisent tout autrement à eux-mêmes que les prudents ne se peuvent raisonnablement plaire. Ils regardent les gens avec empire ; ils disputent avec hardiesse et confiance ; les autres avec crainte et défiance : et cette gaieté de visage leur donne souvent l'avantage dans l'opinion des écoutants, tant les sages imaginaires ont de faveur auprès des juges de même nature. Elle ne peut rendre sages les fous ; mais elle les rend heureux, à l'envi de la raison qui ne peut rendre ses amis que misérables, l'une les couvrant de gloire, l'autre de honte. » <104 p.1116>
Le célèbre exemple de la planche :
« Le plus grand philosophe du monde, sur une planche plus large qu'il ne faut, s'il y a au-dessous un précipice, quoique sa raison le convainque de sa sûreté, son imagination prévaudra. Plusieurs n'en sauraient soutenir la pensée sans pâlir et suer. » <104 p.1117>
Joseph JOUBERT / Carnets / nrf Gallimard 1938-1994
« L'imagination est le goût. La raison est sans appétits : la vérité et la justesse lui suffisent. » <22 mai 1808 t.2 p.271>
Théophile GAUTIER / Mademoiselle de Maupin (1835) / OEuvres / Robert Laffont - Bouquins 1995
« Bien des femmes ont profité de l'amour qu'inspiraient des déesses, et une réalité assez vulgaire a souvent servi de socle à l'idole idéale. C'est pourquoi les poètes prennent habituellement d'assez sales guenipes pour maîtresses. - On peut coucher dix ans avec une femme sans l'avoir jamais vue ; - c'est l'histoire de beaucoup de grands génies et dont les relations ignobles ou obscures ont fait l'étonnement du monde. » <p.249>
Marcel PROUST / Albertine disparue / À la recherche du temps perdu / Quarto Gallimard 1999
« Laissons les jolies femmes aux hommes sans imagination. » <Ch 1 p.1935>
Victor HUGO / Faits et croyances / Océan / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1989
« La raison, c'est l'intelligence en exercice ; l'imagination c'est l'intelligence en érection. » <1845-50 p.158>
Jean-Marie GOURIO / Brèves de comptoir (t.2) / Robert Laffont - Bouquins 2002
« Le réel dépasse la fiction, mais pas longtemps, on voit bien que le réel fatigue. » <p.42>